Vincent Lefort médaillé du CNRS pour la plateforme de bioinformatique ATGC

Distinctions Informatique

Toujours moins cher et plus rapide, le séquençage génétique est une mine d’or pour les chercheurs de nombreux domaines. Ce flot de données a cependant besoin d’être manipulé avec précision et efficacité. Le LIRMM (CNRS/Université de Montpellier) héberge ainsi la plateforme en ligne ATGC, qui offre de nombreux programmes à cet effet. Son responsable a été récompensé par la médaille de cristal du CNRS.

La génomique a entraîné la bioinformatique dans son sillage : l’étude de l’ADN demande de manipuler de telles quantités de données que des outils numériques ont dû être développés et partagés entre chercheurs. Nommée d’après les quatre nucléotides formant notre génome, la plateforme en ligne ATGC diffuse ces logiciels aux équipes du monde entier sous l’administration de Vincent Lefort, du Laboratoire d’informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (LIRMM, CNRS/Université de Montpellier). Cet ingénieur de recherche a reçu la médaille de cristal du CNRS, décernée au personnel d’appui à la recherche.

« Le séquençage à haut débit est une des grandes révolutions de la biologie ces dernières années, mais comme notre génome est composé d’une suite de trois milliards de lettres, on ne peut absolument pas travailler dessus à la main, insiste Vincent Lefort. Si le premier décodage complet du génome humain a pris dix ans et coûté dix milliards de dollars, il suffit à présent de deux jours et de mille dollars pour faire la même chose. » Une rapidité qui a entraîné une explosion de la demande, et ainsi du flux de données à traiter.

Nos logiciels sont à présent utilisés partout dans le monde. 

Initiée en 2000 par l’équipe Méthodes et algorithmes pour la bioinformatique (MAB, LIRMM), ATGC fournit, diffuse et valorise des outils informatiques pour analyser des données biologiques, souvent issues de séquençage d’ADN et de protéines. Parmi les nombreux programmes proposés, Vincent Lefort a en particulier contribué à PhyML, un logiciel devenu central en phylogénie : l’étude de l’histoire évolutive des espèces. En scrutant les données génétiques de plusieurs espèces, PhyML reconstruit des arbres décrivant leur histoire évolutive : les branches relient les espèces ancestrales aux espèces contemporaines.

« C’est un problème difficile d’un point de vue algorithmique, prévient Vincent Lefort. Des milliards d’arbres différents peuvent correspondre aux mêmes données, on ne peut raisonnablement pas tout explorer. Nous utilisons donc des heuristiques pour réduire les possibilités à seulement quelques arbres, les plus plausibles, et nous continuons d’améliorer PhyML. Le logiciel est également utilisé pour analyser l’épidémie de COVID-19 : certaines analyses ont permis d’estimer la date de passage du virus chez l’homme, ou encore de retracer l’évolution de quatre haplotypes. »

Depuis 2018, Vincent Lefort consacre également une partie de son temps à l’Institut français de bio-informatique (IFB) qui, comme son nom l’indique, regroupe les plateformes nationales de bioinformatique. L’IFB est le nœud français d’Elixir, l’équivalent à l’échelle européenne.

Parmi ses missions, Vincent Lefort participe à l’organisation de conférences dans le domaine, qui rassemblent jusqu’à 500 chercheurs. La grande messe de 2020, organisée à Montpellier, a de son côté réuni 700 personnes en ligne, grâce à un tournant tout numérique que les organisateurs ont réussi à opérer en seulement deux mois, pour cause de crise sanitaire.

Nous sommes parvenus à mobiliser un noyau de quelques personnes très motivées et faire que le colloque se déroule sans incident technique, au point que des responsables d’autres évènements scientifiques viennent à présent nous demander conseil. 

Une dévotion à l’organisation et à l’aide à la recherche qui a des racines surprenantes. « Quand j’étais au lycée, je m’étais mis en tête de contribuer à trouver un vaccin contre le SIDA, se souvient Vincent Lefort. On m’a orienté vers la médecine, je me suis finalement retrouvé en biologie. En quatrième année, j’ai découvert le logiciel BLAST, qui repère les similarités dans les séquences génétiques, et j’ai réalisé que je pouvais combiner l’informatique, que je considérais alors comme un loisir, aux sciences de la vie. Je suis ensuite allé vers la recherche publique et j’ai trouvé un travail très stimulant, entouré de personnes incroyables. Et quand on m’a annoncé que j’avais reçu la médaille de cristal du CNRS, ce en plein confinement, j’en ai eu les larmes aux yeux. »

Contact

Vincent Lefort
CNRS research engineer, member of LIRMM