Romain Robbes et le génie logiciel
Romain Robbes a rejoint le Laboratoire Bordelais de Recherche en Informatique (LaBRI - CNRS/Bordeaux INP/Université de Bordeaux) en 2022 en tant que directeur de recherche CNRS.
Quel est votre domaine de recherche ?
Romain Robbes : Mon domaine de recherche est le génie logiciel. Souvent, les gens se demandent en quoi consiste la recherche dans ce domaine. Il ne s'agit pas simplement d'écrire du logiciel. Cela consiste à étudier les problématiques des divers acteurs du génie logiciel (développeurs, testeurs, etc), identifier des problèmes importants, et proposer des solutions à ces problèmes. Je trouve cela très important car le logiciel a une place essentielle dans la société, il est présent dans notre quotidien.
Par exemple, je me rappelle avoir vu, au Chili, un feu de circulation qui affichait un compte à rebours avant de traverser une rue : 3, 2, 1, 0, -1, -2, -3… il y avait clairement un “bug” dans le logiciel ! Mais, d'où venait ce bug ? Cet exemple illustre bien que développer du logiciel est un challenge, surtout pour les logiciels de très grande taille, et/ou qui vivent longtemps : certains logiciels ont plus de 50 ans, d’autres font des millions de lignes de code ! Tout logiciel utile est régulièrement modifié pour répondre aux nouveaux besoins de ses utilisateurs, et plus un logiciel est complexe, plus la tâche est difficile.
Je m’intéresse donc à un éventail de techniques pour aider au développement et à l’évolution de logiciels, particulièrement ceux qui utilisent l’apprentissage automatique. Depuis plusieurs années, je cherche à appliquer les techniques qui font fonctionner des outils comme ChatGPT dans le cadre du logiciel, ce qui nécessite certaines adaptations. En effet, le logiciel, même s’il peut ressembler au langage naturel au premier abord, est assez différent, notamment dans le cas des systèmes larges, qui changent constamment.
Qu’avez-vous fait avant d’entrer au CNRS ? Pourquoi avoir choisi le CNRS ?
R.R. : Je suis entré relativement tard au CNRS. J’ai eu une carrière assez longue et internationale avant de revenir en France. Entre 2004 et 2008, j’ai fait une thèse à l’Université de Lugano, en Suisse, suivie d’un post-doc en 2009. J’ai ensuite pris un poste d’Assistant Professor à l’Université du Chili de 2010 à 2015, avant d’être promu Associate Professor. En 2017, je suis arrivé à l’université de Bolzano, en Italie. Finalement, depuis 2023, je suis chargé de recherche CNRS au LaBRI à Bordeaux.
Ayant passé 12 ans sur des postes d’enseignant-chercheur au Chili et en Italie, je sais ce que c’est de “jongler” entre l’enseignement, la recherche, et les tâches administratives, ce qui n'est pas toujours simple. Je voulais me consacrer plus à la recherche et retourner en France après la pandémie de Covid-19. Le CNRS est une des rares institutions françaises permettant de se dédier vraiment à la recherche. L’INS2I étant intéressé par mon profil en sciences du logiciel, mon choix apparaissait donc logique.
Qu’est-ce qui vous a amené à faire de l’informatique et/ou des sciences du numérique ?
R.R. : Je suis venu à l’informatique assez tard, durant mes études à l’Université de Caen. J’hésitais entre les maths et l’informatique, mais j’ai beaucoup apprécié le fait de pouvoir développer des artefacts tangibles en programmant. On peut faire tant de choses, si rapidement ! Je me suis donc orienté vers l’informatique, et le côté plus pratique que théorique. De plus, mon père étant professeur d’Université, j’avais une idée assez claire de ce métier. Le choix de poursuivre avec une thèse en informatique a donc été pour moi la suite "naturelle" de mon parcours.