Guillaume Chapuy, ERC Starting Grant 2016
À travers son ERC, Guillaume Chapuy, chercheur CNRS à l’Institut de Recherche en Informatique Fondamentale (IRIF - CNRS/Université Paris-Diderot) souhaite faire communiquer différents domaines scientifiques qui emploient la combinatoire et des objets particuliers qui lui sont associés : les cartes.
La combinatoire est un domaine qui s’intéresse à l’énumération, au comptage d’objets. Ce domaine recouvre à la fois une grande partie des mathématiques, de l’informatique, notamment pour l’analyse des algorithmes, et de la physique mathématique – notamment certains aspects de la physique quantique. En France, la combinatoire a connu un essor particulier dans les laboratoires d’informatique, créant une école française du domaine dont Guillaume Chapuy est issu.
Guillaume Chapuy travaille plus particulièrement sur des objets mathématiques appelés cartes, qui correspondent à un découpage en petites régions d’une surface. Le découpage est réalisé à l’aide d’un graphe, c’est-à-dire un ensemble de points, appelés sommets, qui sont reliés par des arêtes. Les graphes permettent de représenter des choses diverses, allant d’un réseau social à un plan de circulation urbaine, mais aussi de décrire la surface qu’ils recouvrent et dont ils donnent un « maillage » qui est représentable par exemple par un ordinateur. Les cartes ont des propriétés combinatoires fascinantes qui ont été beaucoup étudiées, mais qui sont encore loin d’être complètement comprises. Il se trouve que ces objets mathématiques apparaissent dans les différents domaines concernés par la combinatoire : physique mathématique, théorie des cordes, théorie des graphes, dessins de graphes, propriétés de recollements de l’ADN. Dans chacun de ces domaines, ce sont non seulement les cartes qui apparaissent, mais aussi la question de leur énumération. Ainsi, différents points de vue combinatoires sur ces objets ont été développés, en relation avec chaque domaine.
Les cartes correspondent à un découpage d’une surface par un graphe, mais il existe plusieurs types de surfaces, plus ou moins complexes. Les mathématiciens classifient les surfaces selon leur nombre d’anses, ou de « trous » : sphère (surface pleine à 0 trous), donut (surface à 1 trou), double donut (surface à 2 trous), et ainsi de suite. Plus les surfaces comprennent de trous, plus la combinatoire du graphe dessiné dessus, et donc la compréhension de la carte, sont complexes. Intuitivement plus une surface a de trous, plus la complexité du tracé dessiné dessus peut augmenter, les possibilités d’entrelacements du dessin augmentant. Les travaux de Guillaume Chapuy se concentrent plus précisément sur la combinatoire des cartes quand le nombre de trous, appelé genre, augmente. Cette question amène naturellement à s’intéresser aux « développements topologiques », qui décrivent mathématiquement cette explosion combinatoire.
L’originalité du projet de l’ERC de Guillaume Chapuy est d’étudier ensemble les approches des différents domaines traversés par la combinatoire des cartes quand le genre augmente, et de chercher à les unifier. L’approche combinatoire développée par l’école informatique s’est beaucoup intéressée aux cartes de genre 0, mais la physique mathématique laisse présager des apports importants dans le genre supérieur. Guillaume Chapuy essaie donc de faire se rapprocher différents domaines confrontés à cette même problématique, pour que chacun puisse se nourrir des apports des autres, mais aussi que chacun en retire de nouvelles avancées propres à son domaine. Plusieurs avancées récentes, en physique mathématique, en combinatoire algébrique, et en probabilités, semblent converger vers l’existence de cette combinatoire qu’il essaie de développer. En construisant une nouvelle branche de la combinatoire, en structurant les résultats déjà obtenus dans l’étude des développements topologiques, il ne s’agit pas seulement pour le chercheur de développer ce domaine pour lui-même, mais que les différents domaines qui l’ont alimenté se rencontrent autour de cette théorie à développer.