Vincent Hayward, ERC Proof of Concept 2014

Distinctions International Robotique

Vincent Hayward, enseignant-chercheur à l’Université Pierre et Marie Curie et membre de l’Institut des Systèmes Intelligents et Robotiques (ISIR, CNRS/UPMC), est lauréat d’une bourse ERC « Proof of Concept » pour son projet « RELAX » (Optimal Person-Machine Sensorimotor Coupler for Application to Micro-Manufacturing).

Vincent Hayward s’intéresse à la perception tactile, aux interfaces haptiques, et à la robotique. « Fellow of the IEEE » depuis 2008, il a également été récipiendaire d’une « ERC advanced grant » en 2010. A l’origine formé en mécanique, il travaille aujourd’hui avec des neuroscientifiques, psychologues, et spécialistes d’autres domaines comme la tribologie pour faire avancer les connaissances dans l’étude et la compréhension du sens du toucher humain.

Les sens de la vision et de l’audition ont été étudiés en détails à tous les niveaux, à la fois en biologie et en robotique. Les connaissances des systèmes visuel et auditif naturels sont très avancées, et les retombées en vision artificielle ont été nombreuses. Le sens du toucher reste en revanche relativement méconnu. Pour cette raison, Vincent Hayward a été attiré par l’étude de la sensorialité tactile dans ses recherches.

Il a fait le choix de s’y intéresser au début des années 1990, lorsqu’il a constaté les progrès décevants de la robotique dans ce domaine, et les développements possibles en biologie. Les lacunes des connaissances sur le sens du toucher sont à tous les niveaux : sur la physique des contacts, la physiologie du toucher, les processus computationnels attenants au toucher… des manques qui limitent probablement les évolutions en robotique. Aujourd’hui, il n’existe pas de robot qui ait une capacité tactile qui s’approche même de loin de celle d’un animal aussi simple qu’un ver de terre.

L’approche de Vincent Hayward a été de travailler simultanément sur deux fronts de recherches. Le premier visait à créer des dispositifs innovants de stimulation du toucher. Le second consistait à utiliser ces premiers pour faire progresser les connaissances. Il fallait en premier lieu développer une théorie vérifiable, et comprendre comment les signaux mécaniques se transforment en sensations, ce qui a fait l’objet de sa précédente bourse ERC. On connait mal aujourd’hui les fonctions neuronales impliquées dans les stimulations mécaniques. Pour vérifier la théorie, Vincent Hayward a employé des expériences de comportement humain puis des études en neurosciences à ce sujet mettant en œuvre des enregistrements des cellules nerveuses, et maintenant de l’imagerie. L’un des enjeux de cette recherche consiste à trouver des méthodes efficaces de reproduction des sensations tactiles. Les applications dans ce domaine sont très nombreuses, allant de la santé, aux cockpits de véhicules, en passant par la réalité virtuelle, le e-commerce et l’électronique grand public.

Les travaux de Vincent Hayward ont donné lieu à plusieurs innovations. Quatre d’entre-elles ont été commercialisées. La première était une interface à retour d’effort à deux degrés de liberté pour la conception aidée par ordinateur, développée par une startup cofondée par Vincent Hayward et nommée Haptic Technologies Inc. La deuxième est une interface à retour d’effort, qui permet de manipuler un objet avec tous les degrés de liberté, et un rendu très fin des sensations. Le troisième dispositif commercialisé, avec Tactile Labs Inc, est un « dispositif de stimulation par tractions latérales » qui permet de donner la sensation d’explorer des surfaces virtuelles, et qui est utilisé actuellement en recherche. Le dernier dispositif commercialisé est un actionneur vibrotactile, qui permet de stimuler le toucher avec grande finesse temporelle et qui est actuellement commercialisé par la startup Actronika.

Le projet qui doit être développé avec la bourse ERC « Proof of Concept », intitulé « RELAX » (Optimal Person-Machine Sensorimotor Coupler for Application to Micro-Manufacturing), avec la collaboration du Professeur Stéphane Régnier de l’Institut des Systèmes Intelligents et Robotiques (ISIR, CNRS/Université Pierre et Marie Curie), implique un nouveau dispositif développé dans le cadre de l’advanced grant correspondante. Le système somatosensoriel est extrêmement sensible dynamiquement et les intervalles de temps impliqués sont très courts. Vincent Hayward et son équipe ont donc conçu un dispositif de reproduction des efforts à très haute-fidélité, qui, couplé à un système de micromanipulation, permet d’obtenir ce que l ‘on pourrait appeler un « microscope mécanique ». Ce dispositif permet d’interagir à l’échelle microscopique et d’en percevoir les effets au niveau macroscopique. L’application visée pour ce système est la manipulation et l’assemblage d’éléments microscopiques solides, comme en horlogerie, où il y a un besoin immédiat. La technique, qui est générique, permet d’amplifier l’interaction mécanique avec un objet d’un facteur de plusieurs millions. Les travaux prévus dans le cadre de la bourse ERC seront dédiés à doter cette technologie du maximum de degrés de liberté.

Ces travaux ont également des retombées dans d’autres domaines, notamment pour les personnes SourdAveugles, qui n’ont d’autres moyens de communication que le toucher. Certains principes théoriques ont commencé à être appliqués à la conception d’un appareil de communication tactile, qui a attiré l’attention de la société Google. Celle-ci a récemment récompensé Vincent Hayward d’un « Google Faculty Research Award », qui permettra de développer le dispositif.

Contact

Vincent Hayward
Professeur à Sorbonne Université, membre de l’ISIR