Loïc Masure et la cryptographie
Loïc Masure a rejoint en 2023 le Laboratoire d'informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (LIRMM - CNRS/Université de Montpellier) en tant que chargé de recherche CNRS.
Quel est votre domaine de recherche ?
Loïc Masure : Ma recherche porte sur la cryptographie, lorsqu'elle est embarquée dans des composants physiques comme une carte SIM ou une carte bancaire par exemple. En temps normal, ces algorithmes de chiffrements sont faits pour résister à des attaques très puissantes pendant plusieurs années. Mais lorsqu'un attaquant mesure le courant consommé ou le champs électromagnétique émis lors de l'exécution de l'algorithme, il peut retrouver des indices sur la clé secrète de chiffrement. En tirant profit de ces indices, il est possible de casser l'algorithme en quelques secondes ! Heureusement, il existe des contre-mesures permettant de rendre ces attaques plus difficiles, au prix d'une exécution plus lente, ou requérant plus de mémoire. Mon travail consiste à la fois à prouver que ces contre-mesures fonctionnent, et dans le cas contraire, à trouver des chemins d'attaque mettant en évidence leur faiblesse.
Qu'avez-vous fait avant d'entrer au CNRS ? Pourquoi avoir choisi le CNRS ?
L.M. : J'ai fait des études en mathématiques appliquées, plus particulièrement en traitement du signal et en apprentissage machine. C'est un peu par hasard que j'ai découvert la cryptographie, en Erasmus. Par chance, j'ai trouvé un sujet de thèse qui alliait les deux au CEA - Leti, à Grenoble. À l'époque, les chercheurs en cryptographie embarquée étaient très divisés sur la pertinence de l'apprentissage machine, notamment à cause de leur côté « boîte-noire ». Mes travaux de thèse ont donc consisté à montrer les avantages et les limites de cette approche. Ce fut extrêmement enrichissant !
Puis je suis parti deux ans en postdoctorat à l'Université catholique de Louvain, en Belgique. J'y ai rencontré des scientifiques formidables et une grande liberté de recherche, grâce au financement ERC du professeur qui m'a accueilli. Après avoir goûté à cet environnement de recherche exceptionnel, il me tenait à coeur de poursuivre mes travaux dans un cadre semblable : le CNRS était selon moi l'endroit idéal pour cela.
Qu'est-ce qui vous a amené à faire des sciences informatiques ?
L.M. : J'ai toujours aimé les mathématiques et pour moi, les sciences informatiques étaient une manière d'allier l'abstraction des mathématiques au concret. Écrire du code est un vecteur très puissant d'expression des idées, qui peut trouver des applications dans d'autres sciences. Par exemple, pendant la crise du Covid, j'ai découvert les modèles de propagation d'une épidémie. En écrivant un petit code de simulation, j'ai réalisé à quel point cela pouvait être utile et amusant pour montrer les effets du confinement sur l'évolution de l'épidémie !
En informatique, on a la chance de ne pas être très contraints matériellement dans nos expériences. Contrairement à d'autres disciplines où les manipulations expérimentales peuvent prendre des mois et demander des budgets colossaux, la plupart de mes expériences ne demandent pas de gros moyens matériels. Cela permet une approche dynamique faisant dialoguer la théorie et la pratique, et qui s'alimentent l'un l'autre dans une synergie vertueuse.