Quand l'optimisation rencontre la bioinformatique : entretien avec Annie Chateau
Partons à la découverte de l'optimisation avec Annie Chateau, professeure à l'Université de Montpellier, membre du Laboratoire d'Informatique, de Robotique et de Microélectronique de Montpellier (LIRMM - CNRS/Université de Montpellier)
Comment décrireriez-vous l'optimisation ? Qu'est-ce qui vous a donné envie de travailler sur l'optimisation ?
Annie Chateau : L’optimisation est une façon de penser les problèmes sous un angle quantitatif. Il ne s’agit pas de trouver « juste » une solution à un problème, mais de trouver la « meilleure » selon un critère donné. Et ce qui est intéressant dans cette façon de travailler, c’est que l’on peut attribuer bien des significations au mot « meilleure ».
L’optimisation est venue de façon très naturelle dans mes recherches en bioinformatique, car elle permet d’accéder à un panel d’outils de modélisation très varié. Elle donne un cadre théorique et pratique très fourni d'une part, et d’autre part permet de questionner directement les objectifs en lien avec le problème que l’on cherche à résoudre. Par exemple, quel est le critère qui permet de dire qu’un alignement de séquences est meilleur qu’un autre ? La réponse dépend du contexte biologique ça donne une marge de manœuvre plus qu’intéressante.
Quels défis avez-vous rencontrés dans vos travaux récents ?
A.C. : Mes travaux récents portent essentiellement sur des problématiques de stockage et de manipulation de données de séquençage d’ADN. Plusieurs questions sont en jeu, comme optimiser la quantité de données que l’on peut stocker ou optimiser les ressources, en temps de calcul et en mémoire, qui sont nécessaires pour les interroger et les mettre à jour. C’est un défi considérable sur lequel travaillent de nombreux chercheurs et chercheuses issus de divers domaines. J’essaie d’y apporter un éclairage théorique afin de donner un ordre de grandeur à ce que l’on peut espérer en pratique et explorer les grandes familles de méthodes, sans perdre de vue la faisabilité algorithmique. En bioinformatique, un défi majeur est de proposer des solutions qui sont en accord avec les attentes des biologistes : cela oblige à ne jamais se contenter de la première modélisation, c’est très enrichissant !
Quels sont les sujets de recherche sur lesquels vous souhaiteriez travailler dans le futur ?
A.C. : Les sujets de recherche qui m’inspirent en ce moment concernent les défis autour de la santé et du développement durable. C’est au cœur de l’actualité, mais c’est surtout source de sujets dans lesquels je peux apporter ma pierre à l’édifice. Il est essentiel de concevoir des modèles et de les manipuler, de les ajuster aux besoins du monde réel et d’explorer des connaissances nouvelles grâce à ces outils, ce qui est exactement dans mon domaine de recherche. Si nous ne nous adaptons pas, si nous n’anticipons pas non plus les changements qui peuvent s’opérer, faire de la science deviendra très compliqué pour les générations futures. C’est pourquoi la réutilisation de données déjà générées ainsi que les méthodes « non coûteuses » en ressource sont ma priorité pour les prochaines années.