L’Homme pollue aussi les océans… par le bruit

Hervé Glotin, chercheur au Laboratoire des Sciences de l’Information et des Systèmes (LSIS,CNRS/Université Aix-Marseille/ Université de Toulon) utilise le traitement du signal pour mieux comprendre les comportements des cétacés. En analysant les sons qu’ils émettent, ses travaux ont montré que la pollution acoustique générée par l’Homme avait un impact important sur la santé de la biodiversité sous-marine.

Au sein du LSIS et dans le cadre du projet SABIOD du défi interdisciplinaire MASTODONS, Hervé Glotin s’est spécialisé en traitement du signal en bioacoustique. Il a défini des filtres originaux et des systèmes de reconnaissance automatique par réseaux de neurones profonds pour suivre par acoustique passive l’activité de la faune sous-marine. Cet outil peut être appliqué comme système d’alerte pour limiter l’impact de la pollution acoustique engendrée par des chantiers off-shore. Le LSIS est par exemple responsable du suivi des cétacés par acoustique passive sur le chantier de la Route du Littoral à La Réunion. Les dommages engendrés par des nuisances acoustiques sur les cétacés commencent par le stress et une gêne dans leur prédation (certaines espèces chassent avec leur biosonar), et peuvent aller jusqu’à des dommages du système auditif, voir des embolies létales. 

Les modèles d’indexation de flux acoustique sont validés sur des infrastructures diverses, par exemple sur le Parc National de Port-Cros via la plateforme de l’Université de Toulon BOMBYX, ou encore dans la fosse toulonnaise équipée d’hydrophones de l’observatoire de particules ANTARES/MEUST. À l’international, le LSIS collabore avec l’Ocean Network Canada de l’Université de Victoria et le CIBRA de Università di Pavia, ainsi que Cornell University pour des approches calcul haute performance (HPC). 

Le programme actuel sur l’aire toulonnaise permet de mettre en évidence les corrélations de comportement de prédation des cétacés avec les cycles lunaires, mais également avec les bruits émis par les navires. Une autre application concerne l’évitement de collision avec les grands cétacés. Les brevets internationaux de l’équipe en trajectographie passive de ces sources, dont l’un publié aux États-Unis, seront alors mis en œuvre. 

Les calculs d’Hervé Glotin montrent par exemple une approche à 2,5 km de BOMBYX des cachalots, et la détection au-delà de 5km de cet animal. Cela permet une précision sur l’estimation de la densité de population de cette espèce fréquentant l’abysse toulonnaise, et potentiellement une aide à l’évitement de collision avec les ferries très denses sur la zone.