Sarra Habchi et Renaud Vilmart accessits du prix de thèse Gilles Kahn
Sarra Habchi est parvenue à identifier puis corriger les codes induisant des baisses de performance dans les applications mobiles. De son côté, Renaud Vilmart a obtenu des avancées significatives dans le domaine du ZX Calcul, un langage graphique permettant de raisonner en informatique quantique. Pour ces travaux menés durant leur thèse, les deux chercheurs viennent d'être honorés par la Société informatique de France.
Sarra Habchi a obtenu le prix Gilles Khan de la Société informatique de France (SIF), en tant qu'accessit, pour sa thèse « Comprendre les défauts de code spécifiques aux applications mobiles »1 . Soutenu le 6 janvier 2020, ce travail a été dirigé par Romain Rouvoy, professeur des universités au Centre de Recherche en Informatique, Signal et Automatique de Lille (CRIStAL - CNRS/Université de Lille/ Centrale Lille). La même distinction a été décernée à Renaud Vilmart pour sa thèse intitulée « ZX Calculs pour l'informatique quantique et leur complétude »2 . Cette dernière a été soutenue le 19 septembre 2019 sous la co-direction d'Emmanuel Jeandel, et de Simon Perdrix, respectivement professeur à l'Université de Lorraine et chargé de recherche CNRS au sein du Laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications (Loria - CNRS/Université de Lorraine/Inria).
Les code smells résultent de mauvaises pratiques dans l'écriture du code source d'un programme informatique conduisant à des chutes de performance de celui-ci. Les applications mobiles installées sur les smartphones sont particulièrement sujettes aux code smells à cause des ressources limitées de ces téléphones. Pour corriger de tels défauts, il est nécessaire de retravailler le code source en faisant en sorte que son comportement ne soit pas altéré par ces modifications. C'est le défi qu'est parvenu à relever Sarra Habchi durant sa thèse au laboratoire CRIStAL. « L'une des difficultés principales a été de prendre en compte la façon de travailler des développeurs dans la conception des outils d'analyse des défauts de code afin qu'ils soient adaptés à leurs pratiques quotidiennes », explique la chercheuse. En initiant des collaborations avec des développeurs d'applications mobiles, Sarra Habchi est parvenue à construire trois outils d'analyse statique capables de détecter et corriger rapidement les défauts liés aux code smells sans que cela induise un surcroît d'activité pour le développeur.
« Si à peine 30% des applications mobiles sont conservées par leur utilisateur trois mois après leur téléchargement, c'est en grande partie à cause des problèmes de performance liés à la présence de code smells », précise Sarra Habchi. Dans la perspective d'améliorer la fiabilité de ces applications, la scientifique poursuit actuellement ses recherches dans le domaine du génie logiciel à l'Université du Luxembourg dans le cadre d'un postdoctorat dédié à l'étude de tests non-déterministes. « Sans les conseils avisés de mon directeur de thèse et d'autres chercheurs du laboratoire CRIStAL, comme la professeure Laurence Duchien, je n'aurais sans doute pas pris le risque d'effectuer cette mobilité à l'étranger », assure Sarra Habchi qui ne regrette absolument pas sa décision.
S'inscrivant dans un registre beaucoup plus théorique, la thèse de Renaud Vilmart s'est focalisée sur des problèmes d'axiomatisation du ZX Calcul, un langage graphique pour l’informatique quantique au fort potentiel. Avant d’entreprendre un doctorat, Renaud Vilmart a suivi un cursus d'ingénierie en informatique à l'Ecole nationale supérieure des mines de Nancy. « C'est à la suite d'un cours passionnant de Simon Perdrix sur l’informatique quantique que j'ai décidé d'intégrer le Loria car ce laboratoire offrait la possibilité de faire de la recherche d’avant-garde sur cette thématique en pleine effervescence », se souvient Renaud Vilmart. A l'occasion d'un stage dans l'équipe Mocqua, commune au Loria et à Inria, il se lance tout d'abord dans l'étude d'un langage graphique permettant de calculer et raisonner en quantique sous la houlette de ses futurs directeurs de thèse. « Ce travail m'a permis de mieux appréhender à la fois la puissance et les limites des approches graphiques dans le domaine quantique », explique le chercheur qui découvre par la même occasion la thématique du ZX Calcul.
Durant sa thèse, Renaud Vilmart va ensuite aborder le problème de complétude de ce langage issu de la théorie des catégories. L'objectif du scientifique: déterminer s'il existe suffisamment de règles pour capturer complètement la mécanique quantique à l'aide de ce langage. « Parce qu'il est à la fois très intuitif et capable d'unifier d'autres modèles de calcul quantique tels que les circuits quantiques et le calcul par mesure, le ZX Calcul pourrait grandement faciliter la conception du futur ordinateur quantique », souligne-t-il. Après un séjour postdoctoral d'un an au Laboratoire de recherche en informatique (LRI - CNRS/Université Paris-Saclay), Renaud Vilmart vient d'être recruté en tant que chercheur Inria au sein du tout nouveau Laboratoire Méthodes formelles (LMF - CNRS/ENS Paris-Saclay/Université Paris-Saclay) où il se consacre pleinement au développement du ZX Calcul.