« Pérenniser et amplifier la collaboration scientifique franco-libanaise »

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Lancé officiellement en novembre dernier, l'International Research Projet (IRP) Approches de Diagnostic et de cONtrôle Intelligent des Systèmes (ADONIS) associera durant cinq ans (2020-2024) des scientifiques du CNRS, en France et au Liban, de l'Université de technologie de Compiègne et de l'Université libanaise. Ce programme de recherche international entend consolider une collaboration fructueuse débutée il y a plus de 20 ans dans les domaines du contrôle, de l’analyse des données et de la maîtrise des incertitudes.

Dans quel contexte l'IRP ADONIS a-t-il vu le jour ?

Reine Talj-Kfoury : Ce projet est la suite logique d'un partenariat noué de longue date entre l'Université libanaise (UL) et plusieurs laboratoires de l'Université de technologie de Compiègne (UTC) et du CNRS. Cette collaboration a débuté en 1997 au travers d'une convention générale signée entre l'UTC et l'UL renouvelée à trois reprises. En 2012, un accord cadre de cotutelle internationale de thèses a ensuite été mis en place entre les deux établissements aboutissant à la soutenance de 18 thèses de doctorat. Du point de vue de la recherche, près de 70 publications communes ont été diffusées dans des revues à comité de lecture ou des congrès internationaux depuis 2012.


Quels sont les principaux objectifs de cet IRP ?

R. T.-K. : Il vise tout d'abord à accroître l'attractivité, au niveau international, des recherches menées dans le cadre de cette collaboration franco-libanaise. Il doit par ailleurs permettre de pérenniser et amplifier le volet formation de ce partenariat en offrant plus de possibilités aux étudiants de réaliser des thèses en co-direction entre l'UTC et l'UL. Sur un plan scientifique, ADONIS doit apporter des réponses à un problème que rencontrent aujourd'hui tous les systèmes intelligents à savoir une sensibilité croissante aux défauts à mesure qu'ils se complexifient. Dans le contexte économique difficile que connait actuellement le Liban, cet IRP offre aussi l'opportunité à la France d'affirmer son soutien à un pays avec lequel elle entretient des liens très forts depuis de nombreuses années.


Quels sont les différents partenaires impliqués ?

R. T.-K. : Côté français il s'agit du CNRS et de l'UTC tandis que le Conseil national pour la recherche scientifique du Liban (CNRS-L) et l'UL constituent les principaux partenaires libanais. Les travaux de recherche seront quant à eux réalisés dans trois laboratoires de l'UTC : les UMR Biomécanique et Bioingénierie (BMBI – CNRS/UTC), Heuristique et Diagnostic des Systèmes Complexes (Heudiasyc - CNRS/UTC) et le laboratoire Roberval (UTC). Au Liban, le Centre de Recherche Scientifique en Ingénierie (CRSI) sera également impliqué dans la recherche de l'IRP.

Comment cette recherche sera-t-elle structurée ?

R. T.-K. : Elle va s'articuler autour de deux grands axes théoriques: le contrôle, la tolérance aux fautes et le diagnostic d'une part, la décision, l'incertitude, le traitement du signal et la sûreté de fonctionnement d'autre part. Trois domaines d'ingénierie viendront irriguer ces deux axes théoriques : les dispositifs de transport propres et intelligents, les systèmes biomédicaux ainsi que les systèmes robotiques et mécatroniques. A l'intersection entre les axes théoriques et les trois domaines d’ingénierie viendront se greffer neuf thématiques de recherche à visée applicative. Certaines d'entre elles bénéficieront directement de la complémentarité entre les équipes françaises et libanaises.

Drone tolérant aux fautes en vol externe © Université libanaise

De quelle manière cette complémentarité va-t-elle s'exprimer ?

R. T.-K. : L'étude de la commande des drones et de sa tolérance aux fautes fait partie des thèmes pour lesquels nous allons pouvoir mutualiser les moyens des plateformes de recherche du laboratoire Heudiasyc et de l'Université libanaise. Nos activités de recherche conjointes porteront sur la conception, la modélisation et le contrôle de mini véhicules aérien multi-rotors. Nous nous intéresserons plus particulièrement à la tolérance aux fautes de drones en présence de défauts matériels et logiciels, à la robustesse au vent et aux perturbations lors de vols en extérieur ainsi qu'à la fusion de données pour les défauts de perception. Dans le domaine biomédical, les scientifiques du laboratoire BMBI travailleront entre autre sur un système de prédiction des accouchements prématurés en collaboration avec des chercheurs de l'UL et le service obstétrique d'un centre hospitalier libanais.

À quel genre de défis les travaux de l'IRP devraient-ils répondre ?

R. T.-K. : Si l'on prend la problématique de la fiabilité des véhicules autonomes, sur laquelle je travaille au sein d'Heudiasyc, un ensemble de sources d'incertitudes découlant de la perception de l’environnement et de de l'interprétation de la scène dynamique par l'utilisateur nécessite d'être mieux pris en compte dans les modèles mathématiques. Sur un véhicule autonome, des économies d'énergie significatives peuvent également être réalisées en anticipant davantage ses trajectoires et ses cycles d'accélération et de décélération. Les recherches du laboratoire Roberval sur la modélisation et la conception de systèmes de conversion d'énergie s'inscrivent dans un registre similaire. De façon plus générale, ADONIS doit contribuer à renforcer la fiabilité des outils de diagnostic et de prise de décision assurant le fonctionnement d'un large éventail d'applications en veillant à respecter des critères de sécurité et d'efficacité toujours plus exigeants.

Contact

Reine Talj-Kfoury
Chargée de recherche CNRS à Heudiasyc